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Kasper T. Toeplitz

Troisième opus du label Alamuse.

Instabilité entre son et silence, entre stagnation et pression de l’air ; ou encore fantômes digitaux, rémanences de ce qui n’a pas eu lieu – et l’électronique “live” qui sculpte cette matière. Instruments démultipliés à l’excès ou au contraire réduits au souffle le plus ténu, distordus et parasités par eux-mêmes autant que par la grouillante immobilité de la danseuse, corps à entendre. Une lenteur toujours en déséquilibre aux brusques accélérations, un statisme rempli d’électricité, un mur de son.

Inoculate?_

© Romain Bonissol

“L’ennui avec les notes d’intention – toujours écrites bien avant que la composition de la pièce ait débutée – c’est qu’elles ne sont que cela, intentions. Intentions un peu abstraites, situées dans une sorte de réalité virtuelle, loin de ce qui est la musique même, loin du travail avec les musiciens, de la prégnance des sons, de l’accumulation du temps, de la confrontation de ce que l’on est en train de faire avec ce que l’on vit, avec le monde autour.
La rencontre – faite autant en studio, avec instruments, que simplement humaine, discussions autour d’un café – avec le trio Journal Intime a rapidement déplacé la structure ou l’idée de la pièce ; il me paraît important et même essentiel de ne pas tant écrire pour tel ou tel instrument, mais pour telle personne. Et si ce musicien a choisi la trompette alors que tel autre se trimballe un saxophone basse (et vu l’encombrement d’un saxophone basse, “se trimballer” est certainement le terme approprié) ce n’est pas qu’une affaire de hasard, c’est déjà un regard sur le monde, et un placement dans celui-ci. Alors après, non, on n’écrit pas ce que les interprètes savent ou aiment jouer – compositeur, on aime trop affirmer son monde et sa propre vision de celui-ci – mais on essaye de les amener à appréhender, à apprécier, ce que l’on propose : voir sa propre sonorité, fruit d’années de travail, comme éclatée de l’intérieur, dynamitage des particules sonores par le jeu de l’autre, les instruments se fondant en un seul, hybride monstrueux ou chacun parasite l’autre, interconnexion rendue possible grâce au passage par l’ordinateur, n’est certainement pas expérience commune, mais lorsque les musiciens se prêtent au jeu, s’immergent dedans, et cherchent à rendre présente la structure de l’ensemble bien plus que leur rôle à l’intérieur de celle-ci, on sait que l’on est sur la bonne voie, on sait que l’on s’attache à créer de la musique. Et encore plus lorsqu’on entend les musiciens vous dire que ce travail-là est en train d’influencer leurs propres projets, leurs propres pratiques.
L’inclusion de la danse dans cette pièce a été une évidence dés le début. Mais surtout pas comme une partie dansée (que la musique aurait accompagnée?) mais comme un autre instrument ; et la danseuse placée sur le même plan que les autres musiciens, que le trio de vents ou moi-même, avec mes machines digitales, devient musicienne, produisant, via des capteurs de mouvement placés sur elle, soit de la perturbation dans les commandes trop parfaites, trop reproductibles, des transformations électroniques apportées aux sons des instruments, véritable “ghost in the machine”, esprit ou fantôme interagissant en permanence avec les commandes, avec la sculpture des sons. Soit, en un autre passage, court solo et moment de calme, produisant, toujours par le mouvement ralenti à l’extrême, son propre bruit audio et le filtrage de celui-ci, comme une mélopée de geste. Tout comme juste avant, le trombone, équipé de capteurs identiques, traduisant le mouvement dans l’espace en un flot continu de données numériques (ce que j’appelle le “data-noise”) jouait des sons qu’il parasitait lui-même, dans le même moment. Une même action, les mêmes moyens – qui danse et qui joue? Les deux sans doute. Et la connivence interprète-compositeur jouait également ici, à ceci près que la danseuse-musicienne avait deux partitions à suivre : celle du sonore et celle du geste, la seconde écrite par Myriam Gourfink, avec laquelle l’entente née d’années de travail en commun garantissait le passage insensible du geste au son.
INOCULATE? est le résultat de ces quelques mois de travail, de passages entre l’idée du sonore écrite sur du “papier électronique” et son émergence dans les haut-parleurs, entre le son acoustique des instruments et leur parasitages par les Zéros et Uns de l’ordinateur, c’est aussi les accumulations, toujours en direct, dans le temps de la musique, de multiples copies de ce que chacun fait ou est, jusqu’à créer un mur sonore grouillant de multiples saxophones, trompettes et trombones en un bloc d’apparent statisme – et, comme pour rapporter le tout à l’instabilité du monde ou à notre humanité, le parasitage constant, le bruit des actions.” K.T. Toeplitz

Plus d’informations et la partition sur le site de Kasper T. Toeplitz

Kasper T. Toeplitz
conception, composition et programmation informatique, live-electronics

Myriam Gourfink, chorégraphie
Deborah Lary, danse & data-noise

Trio Journal Intime
Sylvain Bardiau, trompette
Frédéric Gastard, saxophones basse & soprano
Matthias Mahler, trombone

 

Direction artistique
Kasper T. Toeplitz

 

La Muse en Circuit, Centre national de création musicale
Ingénieur du son Laurent Codoul
Assisté de : Camille Lezer

 

INOCULATE? est une commande de La Muse en Circuit, Centre national de création musicale.
Enregistrement réalisé à La Muse en Circuit, suite à la création d’ INOCULATE? – Festival Extension, Maison des Arts de Créteil, 14 mai 2011, avec la participation du DICRéAM, Ministère de la Culture et de la Communication, CNC, CNL. Avec le soutien de la SPEDIDAM – société de perception et de distribution des droits des artistes interprètes de la musique et de la danse.

Coproduction : La Muse en Circuit, Centre national de création musicale, Sleaze Art.
Avec le soutien de la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France – Ministère de la Culture et de la Communication. © 2011 Distribution : Distrart Musique

 

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